Interview d'Alain BELTRANDO (promo 1981)
Interview réalisée dans le cadre du dossier "Ingénieurs ENSTA Paris et transformation numérique"
En quoi consiste ton métier ?
AB. : Je suis en retraite depuis quelques mois, et ma dernière fonction était de diriger une équipe, la « K Team », en charge de la transformation numérique de la direction des services de Naval Group.
Les objectifs étaient multiples : être capable de recueillir des données pertinentes sur les navires de la Marine nationale, les protéger, les traiter et les faire parler pour améliorer l’entretien de ces vaisseaux.
Les objectifs étaient multiples : être capable de recueillir des données pertinentes sur les navires de la Marine nationale, les protéger, les traiter et les faire parler pour améliorer l’entretien de ces vaisseaux.
Cela a impliqué de travailler sur des capteurs intelligents, la maintenance prédictive, la cybersécurité, la data science et des logiciels de soutien aux maintenanciers (liste de tâches, enregistrements qualité, reporting…), tout cela en utilisant un data center de grosse capacité et hautement sécurisé.
Quel a été ton cursus académique, et en particulier ta spécialisation à ENSTA Paris ?
AB. : Je suis titulaire d’un DUT de Génie Électrique, d’une Maîtrise EEA (Électronique, Électrotechnique, Automatique) et du diplôme d’ingénieur d’ENSTA Paris, option Systèmes Électroniques.
Quelles ont été les grandes étapes de ton parcours depuis ta sortie d’ENSTA Paris ?
AB. : J’ai commencé avec de l’automatique appliquée aux asservissements, puis je suis tombé dans le chaudron de la guerre électronique pendant une dizaine d’années. Je me suis ensuite orienté vers la direction de projets / programmes (systèmes de combat de bâtiments de surface et de sous-marins), puis vers la direction commerciale, le marketing, la direction d’offres et finalement la transformation numérique.
Si je devais retenir une étape déterminante, je citerais mon expatriation à Rome où j’ai travaillé avec mes collègues anglais et italiens sur les frégates Horizon. Cette période n’a pas été simple car nous avions tous la conviction d’avoir raison et ce n’était pas forcément le cas. Cela m’a appris à me méfier de mes certitudes et a accru mon écoute. Cette période, ainsi que de nombreux déplacements à l’étranger avec des rencontres passionnantes, m’ont permis de développer une compétence qui s’est transformée en un cours de négociation internationale et de cross culture que j’enseigne à l’ISEN Toulon et Marseille depuis de nombreuses années.
Si je devais retenir une étape déterminante, je citerais mon expatriation à Rome où j’ai travaillé avec mes collègues anglais et italiens sur les frégates Horizon. Cette période n’a pas été simple car nous avions tous la conviction d’avoir raison et ce n’était pas forcément le cas. Cela m’a appris à me méfier de mes certitudes et a accru mon écoute. Cette période, ainsi que de nombreux déplacements à l’étranger avec des rencontres passionnantes, m’ont permis de développer une compétence qui s’est transformée en un cours de négociation internationale et de cross culture que j’enseigne à l’ISEN Toulon et Marseille depuis de nombreuses années.
De ton point de vue, en quoi consiste la transformation numérique aujourd'hui et comment l'envisages-tu à l'avenir ?
AB. : La transformation numérique consiste à connecter tous les aspects de l’entreprise, sans oublier son environnement. J’utilise le terme environnement au sens large. Il englobe les produits, les clients, le marché, la concurrence, le juridique, le social, l’environnemental… Nous recherchons des mesures et des corrélations dans tous les domaines avec pour objectif d’accroître l’efficacité de l’entreprise ainsi que des produits et des services proposés.
Cette recherche d’efficacité est noble, mais elle ne doit pas se faire au détriment de l’humain. Ce dernier ne doit pas se sentir asservi ou prisonnier d’une technologie qui le dépasse.
L’avenir sera numérique, mais il devra aussi être intellectuel et bienveillant.
Au niveau des écueils, il en demeure d’importants. Il est difficile de tout appréhender d’un coup et l’on se heurte souvent à l’héritage des systèmes d’information existants. Je préconise une approche morcelée et pas à pas, tout en conservant une vue d’ensemble et des objectifs ambitieux.
Il est aussi difficile d’embarquer l’ensemble de l’entreprise dans cette aventure. Toute évolution entraîne des résistances. Convaincre n’est pas suffisant, l’autorité suprême est nécessaire.
Un autre problème est la donnée (la Data). Elle fait l’objet de tous les excès ! On pourrait y associer les sept péchés capitaux (jalousie, envie, avarice…). Mais elle mérite bien mieux : de l’attention, de la pertinence, de la qualité, de l’entretien et surtout du partage. Seul le partage et l’échange de points de vue permettront de tirer le meilleur de la donnée.
Cette recherche d’efficacité est noble, mais elle ne doit pas se faire au détriment de l’humain. Ce dernier ne doit pas se sentir asservi ou prisonnier d’une technologie qui le dépasse.
L’avenir sera numérique, mais il devra aussi être intellectuel et bienveillant.
Au niveau des écueils, il en demeure d’importants. Il est difficile de tout appréhender d’un coup et l’on se heurte souvent à l’héritage des systèmes d’information existants. Je préconise une approche morcelée et pas à pas, tout en conservant une vue d’ensemble et des objectifs ambitieux.
Il est aussi difficile d’embarquer l’ensemble de l’entreprise dans cette aventure. Toute évolution entraîne des résistances. Convaincre n’est pas suffisant, l’autorité suprême est nécessaire.
Un autre problème est la donnée (la Data). Elle fait l’objet de tous les excès ! On pourrait y associer les sept péchés capitaux (jalousie, envie, avarice…). Mais elle mérite bien mieux : de l’attention, de la pertinence, de la qualité, de l’entretien et surtout du partage. Seul le partage et l’échange de points de vue permettront de tirer le meilleur de la donnée.
En quoi ta formation à ENSTA Paris t’a-t-elle aidé ou t’aide-t-elle dans cette action ? Dans ta fonction en général ?
AB. : La formation à ENSTA Paris m’a permis d’aborder mes premiers métiers plutôt techniques avec confiance. ENSTA Paris m’a accueilli alors que mon cursus était moins conceptuel que celui d’autres élèves issus des concours communs ou de Polytechnique. Prendre conscience de cette différence m’a beaucoup servi dans ma carrière. Comprendre que les schémas de pensée se complètent et s’enrichissent m’a permis de monter des équipes qui ont vraiment performé. La formation ne s’arrête jamais. Elle continue tout au long de notre vie professionnelle par des lectures, des séminaires, des stages, des échanges. Et ENSTA Paris nous a appris à aborder des domaines très différents.
Selon toi, quel rôle a / doit avoir l’ingénieur ENSTA Paris dans la transformation numérique ?
AB. : L’ingénieur ENSTA Paris peut être un acteur important de la transformation numérique, mais il ne doit pas se noyer dans la technique car les enjeux sont partout et il ne doit pas travailler seul. Il doit rester à l’écoute des besoins des utilisateurs, ne pas surestimer à l’avance les résultats de ses actions et promettre l’impossible. Il doit convaincre (business plan, maquettes, tests…) mais il doit aussi ne pas hésiter à s’appuyer sur la direction pour avancer et pousser quelques portes qui restent naturellement closes.
Gardes-tu un souvenir anecdotique de l’école ?
AB. : Oui, je garde de nombreux souvenirs de mon passage au boulevard Victor. Tout d’abord de mes professeurs, monsieur Bogdan Grabowsky, professeur d’électronique, qui disait que personne n’avait le cerveau qui chauffait autant que le sien. C’était pour lui un signe de forte intelligence. Je pense aussi à monsieur Hervé Boucher, directeur d’ENSTA Paris et professeur d’informatique, qui avait œuvré pour le Plan Calcul sous la présidence du général De Gaulle. Je garde aussi des souvenirs moins scolaires, comme le journal d’étudiants que nous avions créé et qui s’appelait le « Pied ». Sans oublier les « Boums » du vendredi soir (très animées !), qui nous ont permis de financer le voyage de fin d’études en Crète.
As-tu des conseils à donner aux élèves actuels ?
AB. : Mes conseils seraient de travailler dans un domaine qui les passionne. Cela vous fait avancer à pas de géants. Travaillez en équipe. Soyez à l’écoute de vos collègues, de vos clients, de votre environnement … et adaptez-vous.
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